Centrale Biomasse de Gardanne - Grambois est un village dans le Vaucluse, Luberon, France
Le tribunal administratif de Marseille avait, jeudi 8 juin, estimé insuffisante l’étude d’impact du projet et annulé son autorisation d’exploitation.
L’ensemble des informations est extrait du journal « LE MONDE » du 08.06.2017 à 13h06 • Mis à jour le 09.06.2017 à 17h20
Historique :
La tranche 4 de l’ancienne centrale à charbon de Gardanne, reconvertie à la biomasse au prix d’un investissement de 256 millions d’euros, nécessitera, à l’horizon 2024, plus de 850 000 tonnes de bois par an dont 445 000 tonnes de bois forestier local, le reste provenant des déchets verts et autres bois de recyclage.
Des associations écologiques et des institutions publiques ont émis un doute sur l’étude d’impact réalisée, qui, à leur avis, ne prenait pas en compte un périmètre suffisant autour de la centrale (zone de fourniture).
Les juges, en charge de l’instruction, observent qu’une telle consommation estimée à 37 % de la ressource forestière disponible dans un rayon de 250 km méritait une analyse des incidences prévisibles sur l’environnement ainsi qu’une information complète des populations concernées.
Décision du jugement :
Le 8 juin 2017, la société Uniper France Power avait connu un énorme revers. Le tribunal administratif de Marseille avait en effet annulé l’autorisation d’exploitation accordée par l’Etat, en 2012, à la plus grande centrale biomasse de France, à Gardanne.
Son propriétaire, Uniper, a, selon les juges, procédé à une étude d’impact insuffisante en n’analysant pas « les effets négatifs indirects et permanents du projet sur les espaces forestiers de la zone d’approvisionnement » de la centrale, située dans un rayon de 400 km.
Réaction de l’Etat :
Le préfet des Bouches-du-Rhône, Stéphane Bouillon, a signé, vendredi 9 juin (le lendemain), un arrêté permettant « à titre provisoire » la poursuite de l’exploitation de la centrale de Gardanne. Ce sursis accordé par l’Etat est justifié par le fait que la centrale biomasse « contribue de manière significative au renforcement de la qualité d’accès à l’énergie en Provence-Alpes-Côte d’Azur » et « fait partie des unités de production d’électricité dont le concours est indispensable, en particulier en cas de vague de froid et de risque majeur de coupure d’alimentation électrique ».
Avis des associations et collectivités :
« On est ravi par ce jugement », déclare Frédéric Jacquemart, vice-président de Cèze et Ganière, une association écologiste d’Ardèche, vent debout contre la centrale de Gardanne, « ce véritable aspirateur de forêts qui convoite les châtaigneraies des Cévennes ». Les opposants au projet dénoncent, non pas la biomasse mais son gigantisme. Parmi les demandeurs à l’annulation de l’arrêté d’exploitation figurent une dizaine d’associations de défense de l’environnement, mais aussi le parc naturel régional du Lubéron et celui du Verdon ainsi que deux communautés de communes des Alpes-de-Haute-Provence qui redoutent la déforestation de leurs paysages.
La contrepartie est le lancement d’une nouvelle enquête élargie :
L’Etat a toujours apporté son soutien à ce projet-clé de sa politique de transition énergétique visant à porter d’ici à 2020 la part des énergies renouvelables à 23 %. D’une puissance de 150 mégawatts électriques (MWe), la centrale de Gardanne devrait couvrir 3 % de la consommation électrique régionale.
L’Etat s’est engagé à racheter pendant vingt ans l’électricité produite par Uniper, soit 70 millions d’euros par an. Le ministère de l’environnement a la possibilité de faire appel de ce jugement qui barre la route à l’exploitation de la centrale. Ce dossier que d’aucuns qualifient de « fausse bonne idée écologique » devrait donc compter parmi les premiers travaux pratiques du ministre Nicolas Hulot. Une nouvelle étude d’impact élargie pourrait conduire à un nouvel arrêté d’exploitation.
En réponse au choix offert par l’Etat de cesser ses activités ou de lancer une nouvelle étude d’impact élargie à toute sa zone d’approvisionnement, Uniper France a fait savoir, vendredi dans un communiqué, qu’elle entendait poursuivre provisoirement l’exploitation de la biomasse. La société dispose de neuf mois pour déposer une nouvelle demande d’autorisation d’exploitation. Elle fera appel d’un jugement qualifié de « très pénalisant pour un acteur résolument engagé dans la transition énergétique ». Selon son président, Luc Poyer, « même s’il s’agit d’un coup dur pour les énergies vertes dans ce pays, nous restons convaincus du bien-fondé de ce projet ».
Député et maire de Forcalquier, aujourd’hui porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner justifiait, en mars 2016, ce recours devant le tribunal administratif par la démesure de la centrale : « De tels volumes, ce n’est pas tenable pour une gestion raisonnée de la forêt. Je suis pour la biomasse, pas pour de tels monstres qu’il va falloir alimenter la gueule ouverte. »
L’avocat d’Uniper, maître Frédéric Defradas, estime que « c’est comme si, pour la construction d’une autoroute, l’étude d’impact devait analyser les conditions d’exploitation des carrières. C’est aller trop loin ».
Les Parcs Naturels Régionaux du Verdon et du Luberon se sont étonnés de la menace de supprimer les subventions allouées aux deux parcs naturels régionaux par la région suite à leur prise de position pour le moins « naturelle » et cohérente.
Parmi les requérants, Renaud Muselier, président (LR) du Conseil régional « s’indigne » de la décision du tribunal. « L’écologie, écrit-il dans un communiqué, doit être mise au service de l’économie pour faire de la croissance verte un atout ».